REN&ASKJA — I Never Met a Wolf Who Didn't Love to Howl

RED

Samedi après midi ; 1 :27 pm.

Le Lourd soleil de fin janvier pesait sur Pré-Au-Lard tout entier et d’un regard lassé, un rien monotone, je perdais mon regard sur les routes enneigées, qui venaient une fois de plus d’être déblayée de manière magique. Belle chose que la magie n’est ce pas ? Pour ma part je ne l’utilisais pas vraiment, en même temps… J’avais loupé les longues années d’études à Poudlard, et je m’étais arrêtée au basique Ridikulus, ou bien Wingardium Leviosa ; bien sur, j’avais eu l’ocasion d’apprendre par moi même, par le biais de livres ou récemment de Madame Rosmerta et de mes amis, mais je me sentais toujours diminuée quand il s’agissait de magie. Bon. Cela dit, ce n’était pas comme si j’étais totalement inutile dans un combat n’est ce pas ? La magie n’était pas toujours la solution numéro un, surtout quand la personne concernée était une lycane, qui avait découvert récemment que les émotions fortes lui permettaient également de se transformer. Ce qui me rendait plus… forte en cas de combat – si tant était que je ne fuis pas dés que j’en avais l’occasion – mais également plus dangereuse pour moi et les gens que j’aimais. Un soupir s’echappa de mes lèvres alors que je repensais aux personnes que je n’aurais jamais voulu blesser. Sans surprise, la première image à apparaître était bien celle d’Heather, le professeur Indriason hantait mes rèves et mes angoisses, ne serait ce que par son statut de … et de quoi d’abord ? De femme qui partageait mon lit et dont j’étais folle amoureuse ? J’étais stupide. J’étais pathétique, comme si j’étais restée une gamine de 13 ans, ou plutôt comme si j’étais enfin prise dans les pitoyables états d’ames de la gamine de 13 ans que je n’avais jamais eu l’occasion d’être après le drame. Venaient ensuite les têtes d’Aïba et Ren ce qui encore une fois n’était pas surprenant. Quand à Rayan c’était une autre histoire, je ne craignais pas vraiment de le rencontrer sous ma forme lupine, il était après tout chasseur de loups, il saurait s’y prendre face à une bête sauvage, même si la bête en question était son amie d’enfance. A la différence des moroses pensées précédentes celle ci m’amena un léger sourire aux lèvres. L’humeur faisait du yoyo, mais il fallait que je reste tout de même positive. La neige était la, mais elle était accompagnée d’un grand soleil, et les rires des enfants derrière moi, m’apportaient une bonne humeur contagieuse.

Certes, alors que je marchais sur la route entre la poste et la fontaine où j’avais rendez vous, je me surprenais à me demander comment j’aurais été moi, 10 ans plus tot, gambadant au milieu de mes camarades, tenant la main de Rayan dans la mienne. Peut être que j’aurais eu peur de la prétendue cabane hurlante pleine de fantômes, peut être que j’aurais passé tout mon temps aux Trois balais, aux basques de Rosmerta en essayant de l’aider à servir les clients, peut être que je n’aurais pas eu l’autorisation de sortir ou que j’aurais été puni…. Beaucoup d’hypothèses dont je n’aurais jamais la réponse, car je n’avais pas connu Poudlard plus loin que la fin de la deuxième année…

Bah. Ça n’avait pas trop d’importance, il fallait vivre dans le temps présent et non dans le passé. Et dans le temps présent qu’étais-je ? Une jeune femme sympathique, souriante, agréable… Une fille pleine d’amis, toujours prête à tendre la main, et à offrir tendresse et réconfort. Une fille attentionnée qui avait sous sa garde un adorable Poufsouflle qui la rendait fière. Une fille amoureuse, qui avait retrouvé son ami d’enfance et qui avait un meilleur ami fraichement trouvé qui valait de l’or. Meilleur ami avec qui j’avais d’ailleurs rendez vous incessamment sous peu. J’accelerais un peu l’allure, être en retard ne serait pas de bon ton, même si je supposais qu’il s’en fichait. J’étais distraite, et j’étais partie plus tard que prévu parce que je n’avais pas réussi à me décider sur ma paire de botte. Du coup, j’avais mis des doc martens rouges, avec un pantalon noir et une chemise rouge sous mon blouson de cuir. C’était un peu comme une vieille chanson, en rouge et noir, tout ça tout ça, mais ne rentrons pas dans ces détails, vous savez tout comme moi que je suis juste amoureuse de la couleur rouge quoi. 1 :35, j’avais cinq minutes de retard et je pressais le pas, normalement Ren devait m’attendre à coté de la fontaine qui trônait au centre historique de Pré-au-Lard, un peu à l’éccart des boutiques. De la nous improviserions, en espérant que notre virée ne soit pas perturbée par une arrivée massive de mangemorts. Non vraiment, la dernière fois, la sortie de Noël avait été un vrai massacre… Je me mordais la lèvre en y repensant. Heureusement Rayan était arrivé.

Dernière foulée, et cinq minutes plus tard j’arrivais à la fontaine cherchant Ren du regard, des excuses plein la bouche pour mon retard. Oui ce n’étaient que 10 minutes, et non je n’avais pas vraiment honte, mais je n’en étais pas malpolie pour autant.

Le mois janvier touchait à sa fin. Bientôt, le temps allait commencer à se réchauffer et la bonne humeur allait peut-être pouvoir revenir dans le cœur de ceux qui se morfondaient. De ce côté, il était clair que j’étais bien placé pour le faire. Récemment, j’avais failli commettre la pire erreur de ma vie… Ce n’était certes pas la première fois que ce genre de choses arrivait, mais j’avais tenté de mettre fin à mes jours. Si Junho n’avait pas été là… Sans doute aurais-je réussi…. Grâce à elle, j’étais encore là à l’heure actuelle.

En cet instant précis, j’étais situé non loin d’une fontaine au centre de pré-au-lard. J’avais donné rendez-vous à Askja, ma meilleure amie. La dernière fois que j’aurais réellement pu discuter avec elle, c’était ce jour maudit qui avait vu basculer la vie de nombreuses personnes, moi compris. Difficile en effet de dire si, oui ou non, j’aurais tenté de mettre fin à mes jours si les évènements de ce genre ne s’étaient pas enchaînés de cette manière. Les choses ne pourraient de toute façon pas être changées et même si ce passage horrible resterait gravé dans ma mémoire je pourrais y repenser en me disant que, désormais, je ne devais plus jamais commettre une telle erreur.

Ma tentative m’avait fait changer… Ou alors peut-être était-ce parce que Junho avait été présente à ce moment là que j’avais changé. Une élève comme les autres, à la différence qu’elle était toujours présente au mauvais moment au mauvais ou plutôt… toujours présente au moment où j’en avais le plus besoin. C’était bien cela, à chaque fois que j’avais été perdu dans mes idées noires, elle s’était trouvée sur mon chemin… Cela avait été suffisant pour que je la considère comme une personne de confiance et lui confie mon journal.

J’aurais certes pu le donner à d’autres personnes… Mais quelque part –et j’étais un peu égoïste de penser cela- je ne connaissais pas réellement Junho et n’avait pas connaissance de ses problèmes personnels. Pour cette raison, je n’avais pas l’impression de rajouter une charge lourde sur une personne déjà prête à céder. Non, je ne connaissais pas les problèmes des autres personnes qui m’entouraient, mais les connaissais un peu plus, ou du moins pas de la même manière.

Quoiqu’il en soit, j’avais changé. J’attendais Askjà près de cette fontaine, en souriant, non pas en affichant cette mine triste que j’avais habituellement sur le visage lorsque les gens me croisaient. Depuis quelques temps, j’avais pu prendre du recul, recommencer à zéro les choses qui m’avaient toujours hanté. J’avais tourné la page en quelque sorte. Depuis que j’avais tenté de mettre un terme à ma vie, j’avais décidé de ne plus regarder en arrière, sauf si c’était pour me dire de ne plus jamais recommencer ce genre de choses.

Certes, cela ne voulait pas dire que j’allais recommencer à utiliser la magie, cette idée m’effrayait toujours autant, mais je ne voulais plus être un fardeau pour les personnes qui m’entouraient, je voulais être une personne avec qui il était agréable de discuter, et par discuter j’entendais parler pour de vrai, à haute voix.

Chaque jour désormais, je tentais de m’exprimer un peu plus, de prononcer un ou deux mots, ne serait-ce que pour moi-même. Je m’en voulais un peu de ne pas avoir été capable de remercier Junho comme je l’aurais voulu l’autre jour. Après tout, elle avait passé la nuit entière à l’infirmerie et s’était même endormie à même le sol- chose que je ne comprendrais sans doute jamais.

Désormais, un bon moment s’était écoulé et j’étais capable de prononcer des syllabes. J’avais beaucoup de mal à les prononcer clairement, ayant beaucoup de mal avec la langue anglaise lorsqu’il s’agissait de la prononcer oralement, m’étant ré-exercé avec les sons que je connaissais déjà, c’est pour cette raison que mon anglais allait sans doute être incroyablement teinte de l’accent nippon lorsque je parlerais les premières fois. Cependant, j’étais assez fier de mes efforts et j’avais décidé de partager ma détermination avec Askjà.

En parlant d’elle, je pouvais désormais voir une silhouette se profiler au loin. Je ne faisais pas réellement attention à l’heure qu’il était, sachant que j’étais tellement impatient de la voir et de lui parler que j’avais pris pas mal d’avance en venant ici, en profitant d’ailleurs un peu pour tenter de réciter mon syllabaire.

J’avais encore beaucoup de mal à prononcer certains mots, mes cordes vocales étant restées inutilisées pendant bien trop longtemps pour que je parle correctement. Par exemples, j’avais du mal à différencier les ba et les pa lorsque je parlais, mais il était tout à fait normal de faire ce genre de choses. Je parlais un peu comme un enfant qui réapprend à parler, mais je savais que dans quelques temps, après de nombreux efforts encore et quelques discussions lentes et incompréhensibles, je parviendrais à parler clairement… du moins je l’espérais.

Quelques instants plus tard, Askjà était enfin arrivée à ma hauteur. Je m’approchais alors d’elle avant de m’incliner un peu, lui adressant un franc sourire. Je me redressai ensuite, la regardant en espérant qu’elle me comprendrait puis j’ouvris la bouche. Au lieu de me perdre en discours inutile, autant lui montrer tout de suite… peut-être qu’elle comprendrait.

« Ca… fait… long…temps. A…su…ku…ja. »

Un large sourire gêné se dessina sur mon visage tandis que je me mettais à craindre qu’elle ne comprenne pas ce que je venais de dire. J’avais parlé très lentement, j’en étais parfaitement conscient, mais j’osais espérer qu’elle était à l’écoute et pourrait comprendre ce que j’avais voulu lui transmettre. Habituellement, on aurait pu dire qu’elle aurait du lire entre les lignes, mais même si j’avais pris mon ardoise avec moi, j’étais bien décidé à l’utiliser au minimum, histoire de parler de vive voix pour pouvoir parler clairement à nouveau. Je ne devais plus laisser mes cordes vocales inactives, même si je devais leur laisser un temps de repos de temps en temps car elles n’étaient pas habituées à servir autant que ces derniers jours. Je tentai ensuite une nouvelle phrase, mon accent étant plus présent que jamais pendant que je parlais.

« Tu…vas…bien? »

RED

La première chose que j’appercu en arrivant à coté de la fontaine fut Ren avec un immanquable sourire aux lèvres qui apporta du baume chaleureux dans mon cœur partagé entre la joie et la mélancolie. Aujourd’hui allait été une bonne journée, et le sourire de mon meilleur ami allait corroborer ce fait. A vrai dire je réalisais avec peine que je ne l’avais jamais vraiment vu sourire. Certes le fait qu’il ne parle pas ne l’aidait pas vraiment à exprimer la joie ou d’autres sentiments positifs, mais ses sourires étaient souvent faux, ou forcés. La, c’était un vrai sourire, et mon sourire usuel, sincère et contagieux fit bien vite son apparition sur mes lèvres fines et rouges.

Et puis l’impensable se produisit, alors que j’arrivais à sa hauteur, il s’approcha de moi en s’inclinant comme à son habitude, dans sa politesse purement orientale que les anglais n’avaient pas du tout. Et il parla. Ce qu’il prononça ressemblait à mon prénom, et ce simple fait me fit sourire jusqu’aux yeux. Asukuja. Le pauvre, déjà que mon prénom n’était pas facile à prononcer pour des anglais, je n’osais même pas imaginer pour quelqu’un d’une nationalité encore plus lointaine comme lui. Quelqu’un qui d’autant plus devait avoir les cordes vocales rouillées. Je m’en fichais. L’essentiel était la, Ren était en train de me parler, et j’aurais presque pu en pleurer tellement j’étais heureuse pour lui.

« Ren ! Tu parles ! » M’exclamais-je d’un coup en souriant, le regardant de haut en bas comme pour chercher si quelque chose d’autre avait changé pour lui. En lui peut être ? Il y’avait une lueur de détermination dans ses yeux, et un grand sourire sur ses lèvres. Le mien devait être similaire.

« Je suis tellement contente de te voir ! Je suis désolée pour le retard. Je me suis perdue dans mes pensées. »

Si lui, parlait lentement pour que je le comprenne, moi j’avais la fâcheuse manie à parler trop et trop rapidement. Enfin ce n’était pas bien grave il comprenait de toute façon. Et comme il le disait ça faisait longtemps. J’avais des choses à lui raconter, lui parler de Heather, lui… avouer ma lycanthropie peut être, et faire une sorte de débriefing de ce qui s’était passé à Noel. Oui, ça serait utile, et probablement nécessaire. Il faudrait bien en passer par la. Mais nous verrions. Pour l’heure il fallait festoyer et célébrer son oralité. J’étais fière de lui.

« Je vais bien et toi ? Tu as l’air different. Tu as l’air… heureux ! »

En disant cela j’esperais bien sur ne pas faire une bourde, il aurait été dommage de noircir la journée qui était pourtant bien partie. Et j’avais tellement de choses à lui demander, des questions à lui poser. Savoir ce qui s’était passé, quel avait été le déclic, comment il s’était décidé à se remettre à parler. Oui. Plein de questions, mais je ne voulais pas le brusquer, alors je me contentais simplement d’un banal.

« Tu veux marcher un peu ou tu veux aller prendre un café quelque part ? »

Moi, tout m’allait tant que ma journée se passait avec lui en fait.

L’anxiété que j’avais ressenti jusqu’au moment où j’avais ouvert la bouche était sans doute la plus grande que j’avais pu ressentir ces derniers jours. Cette crainte de ne pas être compris, de ne pas être écouté, était… réellement désagréable. Cependant, j’avais décidé de faire confiance à Askja qui, je le savais, avait souvent été là pour m’écouter lorsque j’en avais eu besoin et avec qui j’aimais beaucoup passer un peu de temps. Certes, elle devait avoir ses problèmes, mais elle avait toujours été là, même lors du désastre de pré-au-lard. Pour cette raison, j’étais heureux de pouvoir lui montrer que, désormais, j’avais décidé de faire changer les choses, et donc de lui parler de vive-voix… ou du moins aussi vive que possible.

Mes paroles avaient été saccadées, peut-être même totalement floues, mais j’avais réussi à parler. D’un autre côté, qu’aurait-on pu attendre de mieux de la part d’un homme dont la voix est restée éteinte pendant des années ? J’aurais presque pu avoir le timbre d’un grand fumeur si je n’avais pas tenté d’exercer régulièrement mes cordes ces derniers jours… J’avais du mal, mais au moins j’avais fait l’effort d’avancer un peu.

« Oui. J’es…saie.» Avais-je répondu en souriant toujours, réfléchissant à la manière de prononcer les mots que je voulais utiliser.

Bizarrement, l’écriture d’une langue et sa prononciation, même si je l’avais entendue chaque jour depuis plus de six mois, me semblaient toujours aussi difficile… Comme si j’apprenais tout juste à parler. C’était d’ailleurs l’une des nombreuses raisons qui me poussaient à prononcer lentement et calmement chaque syllabe afin d’arriver à quelque chose de correct et compréhensible.

« Ce n’est... rien… Je …suis… content… aus… aus… »

Je bloquai quelques secondes, ce son n’existant pas dans ma langue natale j’avais quelques problèmes à le faire sortir. Pour cette raison, je m’arrêtai quelques secondes, fermant les yeux avant de recommencer.

« Aussi. »

C’était ainsi que je devais procéder si je voulais formuler. Quitte à parler très lentement, je devais aller doucement vers des mots de deux syllabes… j’avais beaucoup de mal, mais lorsqu’ils se prononçaient avec des syllabes qui ressemblaient un peu plus à ma langue…c’était plus simple.

« Je vais…mieux. »

Je n’étais pas venu ici pour lui raconter toute ma vie, mais il était clair que je devrais lui avouer à un moment où a un autre ma tentative de suicide et, finalement, la manière dont j’avais été sauvé par Junho. En fait, me doutais qu’il était difficile d’admettre que je m’étais simplement réveillé un matin avec une envie folle de reparler, surtout après cette longue période de silence dans lequel je m’étais presque volontairement plongé.

« Comme… tu…veux. Je… pense... que… marcher… est… bien. »

Ah… mes constructions de phrase n’étaient pas réellement correctes, il fallait bien l’avouer, mais il était toujours plus facile de comprendre une langue que de la pratiquer soi-même et, à l’écrit, je faisais quand même pas mal de fautes puisque le système était totalement différent… Un jour, j’y parviendrais. Oui, j’en étais persuadé.

« Tu… vas… bien… toi ? »

RED

[HJ *essaye de se mettre dans la peau d'une Askja joyeuse…*]

Pour une bonne nouvelle c'était une bonne nouvelle. Ren parlait. Il avait enfin était capable d'émettre quelques mots qui sortaient de sa bouche, et franchement je n'aurais pas pu être plus heureuse. Oh, bien sur… c'était une façon de parler, j'aurais pu être plus heureuse si Heather m'avait demandé en mariage par exemple. Euh… Mauvaise réflexion. En tout cas j'étais heureuse. Très heureuse, parce que les choses s'arrangeaient pour moi, les choses s'arrangeaient pour lui… Et moi dans tout ça, j'étais ravie d'être la pour lui. Vraiment ravie. Bien sur, il avait du mal à parler encore, c'était saccadé, il ne semblait pas sur de lui. Mais c'était mignon. Ça me donnait envie de le prendre dans mes bras et de l'aider à parler du mieux possible. De toute façon, j'étais une Islandaise qui parlait Anglais avec un Japonais. Donc au niveau de la compréhension tout ça, on repasserait probablement. C'était pas un soucis.

Il souriait. Et son sourire était communicatif. J'étais tellement… Ravie . Et je ne pouvais m'empêcher de lui dire qu'il avait l'air heureux du coup. Ce qu'il acquiesçait bien sur. Il allait bien. J'allais bien. Il était heureux, j'étais heureuse. C'était… Juste parfait non ?

Sourire aux lèvres je ne disais pas grand chose, le laissant prendre le temps qu'il fallait pour qu'il s'exprime. Quelque chose me fit cependant froncer les sourcils. Je vais… Mieux. Je gardais cette information pour plus tard, dans un coin de ma tête, et je ne disais rien pour le moment, me contentant de lui proposer de marcher un peu ou d'aller boire un café. C'était vraiment lui qui décidait, moi, sa simple compagnie me suffisait. Amplement.

C'était mignon, ses structures de phrases étaient enfantines, mais je les comprenais et pour moi c'était l'essentiel. Le sourire ne quittait pas mes lèvres et mes joues rosées.

— Alors marchons un peu tous les deux. La neige offre de merveilleux paysages, je me sentirais presque comme chez moi.

Comme chez moi… Sous entendu en Islande. Ce pays que j'avais quitté il y'a de cela huits ans. De la neige à perte de vue ça ne pouvait que me faire sourire. Et me faire languir d'une famille que je n'avais plus. Peut être que je la retrouverais cette famille, avec Heather. Peut être oui… Ou peut être pas, on ne savait jamais ce qui pouvait arriver n'est ce pas ? Un malheur n'était jamais loin. Surtout quand on était une louve garou… Je me sentais… bizarre d'un coup. Une boule comme un mauvais pressentiment. Mais non, ça ne se pouvait pas. Soyons réalistes voyons, et profitons du moment présent.

Oh, Ren me demandait comment j'allais. Ne l'avait il pas déjà fait ? Je souriais un peu, amicalement, tendrement.

— Moi ça va très bien.

Oui, j'irradiais le bonheur. Peut être parce qu'Heather m'avait dit qu'elle m'aimait? … Ouais bon, si on allait par la, je m'étais transformée en loup just'aprés. Mais soit. N'en parlons pas… Hein.

Petit à petit je commençais à marcher dans la neige avec lui, et ma curiosité pris le dessus.

— Tu voulais dire quoi par je vais mieux, tout a l'heure ?

[hs: éxè *câlin* - désolé, j'ai l'impression que je ne donne pas grand chose x_x ]

J’avais toujours pu trouver une oreille attentive en la personne d’Askja mais, même si j’avais voulu me confier à elle sur les sujets qui avaient marqué mon adolescence, je n’avais jamais réellement été en mesure de le faire. Je n’avais pas osé lui parler de ce qui m’avait brisé, de ce qui avait provoqué chez moi ce mutisme extrêmement douloureux, au niveau psychologique bien évidemment, et désormais je le regrettais un peu. Néanmoins, les choses avaient changés et j’aurais presque espéré qu’elle ne me pose pas de question par rapport à ma soudaine envie de reparler, cette envie de redoubler d’efforts pour parvenir à atteindre ce but, pour recommencer à m’exprimer de vive-voix. Malheureusement, je savais que cette question viendrait un jour où l’autre, peut-être au moment où je m’y attendrais le moins, mais elle viendrait.

Dans tous les cas, je parlais, et quelque part je m’étonnais moi-même à chaque mot qui franchissait mes lèvres car, oui, c’était un peu comme un miracle à mes yeux, même s’il était clair que beaucoup de gens avaient jugé ce retour à la parole possible depuis le début. Aujourd’hui, j’avais réussi à faire ce pas en avant, un pas bien utile, que cela soit pour ma vie sociale ou pour ma profession. Désormais, j’étais capable de communiquer « réellement », car la parole et l’écrit avaient chacun leurs avantages et leurs inconvénients à mes yeux.

Tandis que je faisais des efforts pour parler, je ne pouvais que remercier Askja d’être aussi patiente car, en y réfléchissant bien, tout le monde n’aurait pas supporté longtemps le discours interminable d’un homme de mon âge qui peine à prononcer la moindre syllabe. Askja, elle, le faisait. Cela me rappelait une fois de plus à quel point je tenais à elle et à quel point j’étais heureux d’avoir trouvé une amie comme elle ici.

Plutôt que répondre quelque chose qui n’aurait pas été utile, j’hochai la tête lorsqu’elle me dit que nous allions marcher ensemble. Il était vrai que la neige était un véritable atout pour un paysage. Passionné de photographie comme je l’étais, je ne pouvais qu’approuver ce faire et me rappeler les nombreuses fois où j’avais voulu immortaliser ce genre de vue. La dernière fois, c’était avec Junho que j’étais allé prendre des photos… Je lui devais tellement de choses, à elle aussi…

Je repensai alors à ce qu’Askja venait de me dire, comme quoi elle aurait presque pu se sentir chez elle. Cela m’arrachait un petit sourire tandis que mes pensées se reportaient sur la conversation que j’avais pu avoir quelques temps plus tôt avec Junho, durant laquelle elle m’avait demandé si je comptais retourner au Japon. Peut-être aurais-je en parler à Askja également afin d’avoir son avis sur la question, car il était clair que je ne pouvais pas décider de rentrer sur un coup de tête… même si j’en avais incroyablement envie.

Je me dis finalement que nous aurions bien le temps d’en parler d’ici le moment où nous rentrerions chacun chez nous à la fin de cette sortie : il n’était pas utile de se presser, d’autant plus lorsque je m’exprimais à la vitesse d’un escargot un jour de canicule. Mon sourire s’agrandit donc simplement tandis que j’écoutais la réponse de mon amie qui me disait aller très bien. Quelques temps plus tard, nous avions commencé à marcher dans la neige. C’est alors qu’Askja était revenue sur cette réponse que je lui avais donnée un peu plus tôt, comme quoi j’allais « mieux ».

Je ne savais pas réellement si je devais lui parler de ce qui s’était passé… ou avait failli se passer l’autre soir, à l’infirmerie. J’étais bien heureux que Junho m’ait empêché de commettre le pire pour ma personne, mais je ne savais pas si j’allais avoir le courage de supporter une remontrance de la part d’Askja… D’un autre côté, je ne pouvais pas lui mentir sur ce sujet … La seule solution actuelle était peut-être simplement de lui dire sans totalement le faire.

« Disons... que… j’étais… très… mal. » Avais-je répondu avec ma lenteur habituelle.

Une fois de plus, ma construction ne pouvait que refléter mes origines. Je souris un peu en essayant de faire passer les choses pour des éléments sans importance, mais je ne pouvais pas m’empêcher de repenser à ce que j’avais voulu faire… et presque réussi. Aujourd’hui, les choses avaient quelque peu changé. Certes, j’avais encore des moments où je me sentais réellement mal, je me sentais encore peu à ma place, mais j’avais pris conscience que ma vie n’était pas finie et que je devais arrêter de me morfondre sur le passé…Désormais, je m’étais promis d’aller de l’avant et, pour cette raison, je ne pouvais qu’aller de mieux en mieux et, j’en étais sûr, j’allais parvenir à sortir de ce cercle vicieux dans lequel je m’étais laissé tomber.

Je continuai à marcher dans la neige comme si de rien n’était, détachant mon regard de celui d’Askja dans l’espoir qu’elle ne comprenne pas ce qui avait pu se passer. J’espérais d’ailleurs qu’elle n’allait pas renforcer ses questionnements car j’avais réellement honte des choses horribles que j’avais pu penser à ce moment là, lorsque j’avais voulu m’éteindre, simplement parce que j’étais au plus bas.

Abandonné pour cause de mauvais temps *sbaf*