-Emilie ?

-Oui ?

-Pourquoi tu te fais du mal ? Pourquoi tu fais tout ça alors que tu es si jolie ?


Le garçon prit mon bras entre ses mains et s’empressa d’y caresser avec douceur les cicatrices que je m’étais faite. Je le regardais avec tendresse. C’était mon voisin de palier, un moldu, et je le soupçonnais d’être secrètement amoureux de moi. On se connaissait depuis toujours et il m’avait vu probablement m’embellir à mesure que je grandissais. Il était occupé à caresser les cicatrices sur mes bras, fasciné par les boursouflures qu’elles faisaient sur ma peau. Je me pressais de lui enlever mon bras, et lâchais un rire, gênée.

-Arrête de regarder ça voyons, Josh !

-Alors arrête de te faire du mal. Pourquoi tu fais ça Emy’ ? Tu es si gentille. Si tendre, si douce. Tu aime tellement les gens, et tu ferais tout pour eux. Alors pourquoi te faire du mal à toi ? Tu ne mérite pas tout ça. Tu es la fille la plus attentionnée que je connaisse, alors arrête de te punir… S’il te plait…

Je lui donnais une petite tape sur la joue, le faisant taire.

-Cesse de parler de ça, veux-tu ?

Il acquiesça, et prit entre ses doigts une mèche de mes cheveux. Ils étaient longs, d’une couleur chocolat, et assez soyeux. Je sentais leur parfum abricot, arôme de mon shampoing préféré. Josh me regardait à présent dans les yeux, avec sa ferveur habituelle. Il murmura :

-Tu es jolie tu sais…

Je souriais, gênée une fois de plus. Il me répétait cela sans cesse… Oui, j’étais jolie, apparemment. De taille moyenne, assez mince, j’avais un visage avenant et un sourire éclatant, des dents blanches. J’étais facilement hâlée de peau, je bronzais rapidement au soleil. Mes cheveux faisaient tout mon succès. J’en prenais grand soin, ils m’arrivaient à la taille et brillaient sans cesse. J’avais de grands yeux pétillants, d’une couleur identique à celle de mes cheveux, c'est-à-dire d’un chocolat onctueux.

-Merci Josh. Mais arrête donc de me faire tous ces compliments !

Il se tut alors. Je me levais, et m’approchais du miroir. Il disait vrai… J’étais jolie. Mignonne en fait. Pas forcément d’une beauté incroyable et unique, mais plutôt agréable à regarder. Ce qui intriguait souvent les gens, c’était cette tristesse infinie qui pointait continuellement dans mes yeux. Ce chagrin incroyable que personne n’arrivait à percer. Et mes cicatrices aussi, qui ressortaient incroyablement sur la peau tendre de mon bras gauche. Personne ne savait à quoi elles étaient dû, je changeais irrémédiablement de sujet quand on m’interrogeait à ce sujet. Seul Josh savait. Oui, c’était vrai, c’était moi qui me faisais tout ça. Armée d’un petit cutter qui ne me quittait jamais, il m’arrivait de me couper. Un peu. Pas forcément profondément, juste assez pour que le sang s’écoule. On pouvait bien me prendre pour une folle, je n’en avais que faire. C’était faux. Je n’étais pas folle. Seulement brisée, détruite, fragile et incroyablement triste parfois. Et ça, ça me faisait du bien. Certains buvaient, se droguaient, se saoulaient de sexe et de toutes sortes de substances. Ce n’était pas mon cas. Mon petit cutter suffisait à soulager mes peines. C’était aussi  simple que ça. A part cela… Je pensais pouvoir affirmer que j’étais quelqu’un de bien. Oui, je le pensais vraiment. J’étais gentille, indiscutablement. J’aimais profondément les gens, ma famille, mes amis. J’étais… Attachante, si je puis dire. J’aimais les câlins, les bisous, les moments tendres. J’aimais rire, mais c’était rare ces derniers temps. De façon utopique, je rêvais d’un monde parfait ou chacun serait gentil et où les gens ne seraient qu’amour. Or, ce monde fait de violence et d’atrocités, se heurtait à mes idéaux et me décevait profondément.