« SOMETHING IS COLD AND BLANK BEHIND HER SMILE. »
But all the drugs in this world won't save her from herself...
Tu es là. Prostrée dans l’obscurité. Tu voudrais crier. Laisser percer le tintement de ta voix. Mais la nuit étouffe la respiration, déjà saccadée. La nuit… Tu fermes les paupières. Tu ne veux pas voir l’horizon déjà sombre. Non. Tu ne veux pas observer le soleil qui lentement se meurt. Qui lentement t’abandonne. Alors tu ouvres la bouche. Cette fois, tu vas y parvenir. Tu le sens. Seulement l’épuisement ne t’autorise qu’un simple souffle hésitant. Tu n’es plus certaine de savoir comment faire. Parler. Prononcer les mots. Et les syllabes qui s'enchaînent. Les liaisons que l’on fait. Tu ne sais plus très bien. Qu’est-ce que c’est ?... La panique envahie ta tête. Broyant entre ses doigts de fer, ton esprit. Tu voudrais te relever. Fuir. Raisonner encore. Mais la brume derrière tes yeux s’épaissit. Et tu ne sais plus. Le cœur prend peur. S’extirpe de ta poitrine avec rage. La douleur t’arrache finalement une légère plainte. Tu es confuse. Tu ne comprends plus. Ce que tu fais là ? Et pourquoi tout ce blanc autour de toi ? Tu te redresses avec violence. Écorchant tes avant-bras aux chaînes de ta propre existence.
« Calmez-vous ! » Entends-tu au loin. Mais la langue se déforme. Devient chuchotement persistant. Comme autant de petits susurres sinueux à tes tympans. Non ! Un chuintement emplit ton crâne. Ton hurlement. Il lacère ta gorge. Comprime tes poumons. Le manque d’oxygène te saisit. Tu suffoques. L’étau se resserre. Tu le sens. Pourtant, la libération s’abat. Telle une gifle. Assommant tes songes. Ton corps se liquéfie. Tes membres s’engourdissent. Petites fourmis de la paix à travers tes bras et tes jambes. Le sommeil est pressant. Déjà, tu n’es plus…
Un souffle balaye ta peau. Caresse voluptueuse. Un soupire te prend. Encore ?... Mais seule la brûlure à l’intérieur de ton bras ne semble persister. Tu fronces les sourcils. Grimace derrière tes paupières closent. T’accrochant avec frénésie aux dernières lueurs de sommeil, qui s’estompent. Revient… Seulement, Morphée n’a jamais eu pitié.
« Katarina… » Cette voix… Tu fermes les yeux aussi fort que ton corps te le permet. Petite fille apeurée, au creux de la nuit. Tu voudrais plaquer tes mains contre tes oreilles. Empêcher les sons parasites de filtrer. Mais tes membres se fondent au lit. Enchaînés. La peau pincée par ces sangles trop serrées.
« Non… je n’entends rien. Je n’entends rien… » Un gloussement raisonne près de la fenêtre. Tes prunelles tentent de percer l’obscurité. De creuser le noir installé. Tu n’es pas folle. Il y a bien cette chose, là-bas. Dont les iris semblent luire à travers la nuit.
« Laissez-moi… » Chuchotes-tu à l’invisible. Qu’importe, la folie n’écoute pas sous les ordres ?
« Vous n’existez pas… Vous n’existez pas… » Tu voudrais y croire. Croire aux paroles des médecins, lorsqu’ils évoquent la psychose. Seulement, sa présence paraît… tellement réelle ?... Comme dans tes souvenirs, d'autrefois.
« C’est ce que tu aimerais croire, Katarina. » Sa main effleure ton visage. Absorbe les larmes qui inondent déjà tes joues.
« Qu’est-ce que vous voulez ?... » Son sourire dévoile alors la bête. L’animal tapit derrière un masque aux traits parfaitement dessinés. La stupéfaction te prive du moindre mot. Tu n’as plus peur, pourtant. Après tout ces mois à redouter la nuit. A éprouver sa présence. A avaler pilules sur pilules. La mort ne serait-elle pas, la délivrance ?...
Ce n’est plus une vie, pas vrai ? L’esprit que l’on embrume. Que l’on éteint. Le corps que l’on attache. Que fais-tu donc là ? Tu ne sais plus, non… Le sédatif persiste. Tu te laisses sombrer. Quelques instant, seulement. Quelques minutes uniquement. Mais le corps étranger se mêle au tien. Dans une étreinte glaciale. Ses mains effleurent chaque parcelle de ton être. Caresses dégradantes. Défiant, ta peau brûlante. Non. Tu ne veux pas éprouver cette excitation. Le côté malsain de la scène. Et pourtant, malgré toi, tu te cambres. Malléable sous la tendresse brutale de ses gestes.
« Katarina… tu es un vampire désormais. Accepte le... » Katarina… Tu répètes ton prénom. Litanie incessante. Tu observes ta propre silhouette. Spectatrice. Statue de cire, près du lit. Pantin désarticulé, défaillant sous la passion hérétique de cet être. Tu remues la tête. Ton regard répondant au tien. Pauvre petite fille… Tu tends la main. Tu voudrais prononcer quelques mots. Aider ton reflet, mais… bientôt, tu te perds dans l’obscurité…
« YOU WERE FROM A PERFECT WORLD. »
Her mouth was an empty cut...
« Comment vous sentez-vous aujourd’hui Mademoiselle Kürshner ? » La tête inclinée, tu l’observes. Petit poupon. Un sourire étire tes lèvres blafardes. Elle jette un œil au pansement qui orne ta gorge. Ses doigts effleurent ta peau. Tu fermes les paupières. Savourant ce contact d’une douce chaleur.
« Mieux, désormais. » Tu inspires avec envie les effluves de son parfum. Te faisant violence, pour contenir la furie qui tente à animer ton être.
« Vous ne voulez toujours pas nous dire ce qui vous oppresse ? » Ton rire lézarde les murs. Gras. Moqueur.
« Vous ne me croiriez pas. » Tu te redresses. Plissant des yeux, face aux timides rayons du soleil, qui traversent le store pourtant fermé. La paume de ta main se plaque contre ce dernier. Et tu frissonnes, de la chaire qui crépite. La douleur est exquise. Tu te mords la lèvre.
« J’essaye seulement de vous aider, vous savez… » Tu fais volte-face. Une lueur au fond de ton regard, oblige ton interlocutrice à reculer. Mais, tu es déjà à quelques centimètres de ses lèvres.
« Vous essayez de m’aider ?... » Ta main se pose délicatement contre sa gorge. Le rythme de son cœur vacille contre tes phalanges. Telle la flamme d’une bougie. Tu plonges tes prunelles dans les siennes. Cherchant au tréfonds d’elles, une réponse. Un signe, peut-être. La peur qu’elle émane par vague, embaume ton être. Attisant, le désir. Le grondement animal, blottit au creux de tes reins.
« Qu’est-ce qui vous tourmente, Katarina ?... » Elle essaye de lire en toi. Tu le devines, derrière ses iris émeraudes. Mais elle est loin du compte. Tellement loin…
« Si vous saviez… » Susurres-tu près de son oreille. Tandis que ta bouche effleure l’arrête de sa mâchoire. La tentation est intense.
« Ne criez pas… » Elle fronce les sourcils, sans détacher son regard du tien. Puis, hoche mollement la tête.
« Je vais vous montrer… » Mais ta gueule se referme dans un son guttural autour de sa jugulaire. Ferme, et tendre à la fois…
« Merde ! » Les deux infirmiers entrent en trombe dans la chambre. Le corps de leur supérieur git lamentablement sur le sol désormais imbibé de sang. Tu les observes sans broncher. La bouche encore tiède.
« Qu’est-ce que… Mais vous êtes… » Tu hausses les épaules. Visiblement indifférente.
« Folle ? Il semblerait, oui. » Mais, il est temps pour toi d’échapper à ta prison
[ ... ]
L’arôme âcre des vapeurs d’absinthe mélangé à la sueur s’accroche à tes sinus. L’alcool coule à flot. Les rires lézardent les murs. L’insouciance. Joie éphémère de l’enfance, que l’on devrait occulter. Pour ne pas effleurer le loup. Pour ne pas… ignorer le coup. Un hurlement déchire la nuit. Mais tu refermes dans un bruit sec la porte. Dehors un être vient de percevoir le carnage de la bête. Seul témoin, de ton instant d’errance. Un sourire étire tes lèvres. Les regards suintent le long de ton front, coulent jusqu’à l’arrête de ton nez, puis meurent à ta bouche. Tu es là. Droite. Hautaine derrière ton masque inhumain. Un homme veut comprendre, mais sa nuque ne résiste pas au choc. La peur. Sensation grisante qui te prend le corps. Tu ondules des hanches sous la musique que tu devines, malgré les craintes bruyantes des pauvres agneaux encore présent.
« N’aies pas peur... » Susurres-tu à l’oreille d’une inconnue, alors que tu laisses planer un rire enfantin. Un son guttural raisonne dans la salle désormais silencieuse. Et, ta bouche se referme avec passion autour de sa gorge. Cette fois, la fourmilière s’affole en un long râle hystérique. Certains quittent les lieux à la hâte, d’autres tentent de se dissimuler. Le pantin déjà désarticulé s’effondre sur le parquet. Tu te perds dans un ricanement euphorique. Malsain. Délirant. Excitée par la cohue affolée. Émotion salvatrice, dont tu absorbes la moindre particule.
« Bonsoir. » Tes ongles s’enfoncent dans la jugulaire de cet inconnu, tandis que tu soutiens ses prunelles noisettes. Ton visage retrouve alors l’aspect mensonger. Doux. Séduisant. Presque fragile.
« Je te promets une nuit torride, que tu ne pourras oublier... » « Je te promets une nuit torride, que tu ne pourras oublier... » « Et moi une proposition, que vous ne pourrez pas refuser. » C'est cette femme derrière toi. Son serpent au creux du bras. Un nouveau... destin ?